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Dossiers-délestages en Guinée : Conakry et les villes de province dans tous leurs états

En cette période de confinement qui coïncide avec le mois de ramadan, plusieurs quartiers de la capitale guinéenne broient du noir, à cause de la récurrence des délestages de courant. Les citoyens ne comprennent pas qu’on en soit encore à ce tâtonnement dans la fourniture de courant, malgré les milliards de dollars us investis dans le secteur de l’électricité.

A Conakry la desserte s’est détériorée davantage

Ce citoyen, vivant au quartier Kountia, à l’entrée de Conakry, excédé par le manque de courant,  décrit la situation dans son quartier: “Le courant est arrivé chez moi il y a 15 minutes. Mais c’est reparti. Ici, ça fait des va-et-vient. La nuit, on peut avoir trois coupures, la journée des fois deux. Ça dépend».

Un autre renchérit: “Il est zéro heure passée. Il n’y a toujours pas d’électricité dans mon quartier, Kiroti, dans la commune de Ratoma. Impossible de fermer l’œil à cause des moustiques. Le courant de plus en plus instable ces dernières semaines a été coupé depuis 19 heures. Pendant qu’on était à table, en train de faire la rupture du jeûne. Heureusement que la nature devient clémente. La chaleur diminue au fur et mesure que la nuit avance, grâce à la pluie tombée ce samedi après-midi.”

La commune de Kaloum qui abrite l’essentiel de l’administration publique guinéenne n’est pas non plus épargnée par les coupures intempestives de courant. L’un des quartiers les plus touchés se trouve être Almamya. A l’image de plusieurs communes de la capitale Conakry, ce quartier connaît régulièrement des délestages.

Selon un citoyen de ce vieux quartier de Kaloum, la Guinéenne d’Electricité (EDG) est devenue un mauvais compagnon.  A l’en croire, le dimanche 3 mai dernier, Almamya était sevré de courant de 9 heures 30 minutes à 17 heures. On peut dire pratiquement toute la journée. Entre mercredi et jeudi, il y a eu des coupures dans l’après-midi et dans la soirée.

Ce déficit d’électricité à Conakry en général et à Kaloum en particulier illustre les défis que EDG doit surmonter pour satisfaire les Guinéens dans l’ensemble. Puisqu’on soupçonne l’entreprise de vouloir profiter de la gratuité du tarif social pour sevrer la population de cette denrée.

Dans les provinces du pays, la situation n’est pas plus reluisante

A Mamou, après une desserte en électricité bien fournie au mois de mars dernier, ce qui était une première dans l’histoire de cette ville, les délestages ont repris de plus belle à partir du mois d’avril.

 En ce mois saint de ramadan, parfois le courant électrique est coupé de 19h à minuit. A cela s’ajoutent les délestages intempestifs pendant la journée.

A Kankan, la situation de desserte est plus chaotique

A Kankan, le problème de courant est un phénomène éternel. Difficile à croire, mais aujourd’hui encore,  l’électricité  demeure un luxe pour les citoyens dans la deuxième plus grande ville du pays. Même en cette période de ramadan, aucun changement n’a été apporté dans la desserte.  C’est  le même régime de desserte moribonde qui est en cours d’exécution, avec des ratés à la clé, de façon permanente. En général, les ménages de la ville, n’ont droit au courant de l’EDG,  qu’une nuit sur deux, ce de 18 heures à 01 heures du matin, soit seulement 6 heures d’éclairage en 48 heures. Cette disette d’électricité dans le Nabaya, a beau être dénoncée par les consommateurs, rien n’y fait. Moussa Cissé, est un citoyen résident au quartier Salamani dans la commune urbaine. Au lieu d’une amélioration  »spéciale Ramadan » qu’il espérait, c’est plutôt un autre manquement au niveau de la desserte que nous vivons.   

 Et d’ajouter: « On pensait vraiment en ce mois de Ramadan qu’il y aurait une amélioration, ne serait-ce qu’en prolongeant la desserte à 4 heures voire 5 heures du matin. Mais malheureusement ce n’est pas le cas. Il faut même remercier Dieu si le courant vient chez toi de 18 heures à 1 heure. Parce que depuis le  début de ce mois de ramadan, il se passe pire dans l’approvisionnement en courant. Pas plus tard que ce samedi, j’ai été privé de courant chez moi, alors que c’était mon tour», a-t-il déploré.

En campagne, la situation est encore plus catastrophique. C’est quasiment un fantasme que de parler d’électricité aux habitants des villages environnants ; d’autant plus qu’aussi insuffisante soit la desserte en électricité, aucune sous-préfecture, de la localité de Kankan, ne fait partie de la zone de couverture.

Même les lampadaires qui assuraient l’éclairage public sur les grandes voiries de la circonscription, faute d’entretien ne s’allument plus.

Par ailleurs, à cause de cette mauvaise desserte d’électricité, les cours à distances initiés par le ministère de l’Education, ne sont pratiquement pas suivis à Kankan par les bénéficiaires. 

Bien qu’interpellées sur ce problème de courant à plusieurs occasions, les autorités du pays notamment le président de la République Alpha Condé lui –même, le Premier ministre Kassory Fofana et le ministre de l’Energie Cheick Taliby Sylla, continuent de nourrir les populations du Nabaya de promesses.

C’est la même rengaine Labé

A Labé, qui en principe est connectée sur l’axe Kinkon – Garafiri, c’est la même rengaine: “Depuis l’annonce de la gratuité du courant électrique par le chef de l’État Guinéen dans le but d’accompagner la population en cette période de crise sanitaire, les délestages se font de plus en plus récurrents dans la ville de Labé. Parfois même, la vitale denrée ne vient qu’un jour sur deux avec une tension très faible. En plus des postes téléviseurs, des réfrigérateurs et autres appareils électroménagers; il y a même des lampes qui ne fonctionnent pas avec cette tension qui ne sert pas à grand-chose en cette période. Ce, alors que les élèves en général et les candidats aux examens nationaux en particulier sont appelés à suivre des cours en ligne via la télévision nationale et sur certaines chaînes privées.”

A N’Zérékoré,  le courant est toujours un luxe difficile d’accès

Le courant est toujours un luxe difficile d’accès pour la population de la principale agglomération du sud-est de la Guinée. Le courant dans la capitale de la guinée forestière est vraiment un luxe. Car sur 22 quartiers et 10 sous-préfectures, seuls 12 quartiers sont connectés au réseau de l’EDG, et aucune sous-préfecture. Avec une fourniture d’électricité de 1 jour sur 2 ou de 1 sur 3 par endroit de 18h00 à 00h00 (soit 6h).

Joint par notre reporter, un travailleur de l’EDG, qui a requis l’anonymat précise: « que voulez-vous qu’on fasse, lorsque sur un besoin de 17 mégawatts, on  a moins de 5 mégawatts? Donc la faute ce n’est pas nous mais plutôt à l’Etat. En plus l’extension du réseau fait défaut, c’est pour cette raison que certains quartiers ne peuvent pas recevoir de courant. On a encore à faire », clame-t-il.

Pour Pé Simy, un citoyen résident à la scierie, à moins de 200 m du site de EDG, ‘’malgré notre proximité, avec tout le risque que nous courons avec cette fumée à cela s’ajoute le bruit des moteurs. On a le courant une fois tous les  2 jours. Avant on recevait le courant chaque jour mais cela est devenu un souvenir maintenant. Car ça ne va pas du tout sur ce plan”.

‘’Malgré les promesses tenues par le président lors de sa venue à N’Zérékoré pour l’extension du réseau dans notre quartier, près de 2 ans après, rien n’est fait. Nous, on ne parle même pas de courant car y a même pas de poteaux à plus forte raison des fils”, dira Mamady Condé, un citoyen résident au quartier Heremakono.

Pour l’heure la majorité des citoyens de N’Zérékoré, gardent leur mal en patience, dans un noir indescriptible, surtout en ce mois de Ramadan.

A Kindia, ce n’est pas non plus différent qu’ailleurs. Depuis l’annonce des mesures avancées par le gouvernement  consistant à donner gratuitement l’eau et l’électricité pour soulager les citoyens pendant trois mois en cette période de pandémie du COVID-19, le délestage refait surface encore dans la ville de Kindia. Ces derniers jours, nombreux sont des citoyens qui s’interrogent sur ce manque de courant en mois saint de Ramadan, d’où la nécessité de cette denrée indispensable. Certains citoyens dénoncent le mutisme des responsables de L’EDG sur ce délestage.

« Nous, nous ne comprenons pas cette politique de l’EDG, car depuis que le gouvernement a annoncé que le courant est gratuit, nous n’avons plus de courant. Si ce n’était pas ce mois saint de Ramadan, on allait manifester notre mécontentement. Imaginez, nous on se lève la nuit pour prier mais nous le faisons dans la plus grande obscurité, c’est vraiment méchant »,  dénonce Ibrahima Bangoura.

Abdoulaye Diallo renchérit « ce manque de courant à Kindia accentue la montée en puissance de l’insécurité, la semaine dernière deux jeunes se sont fait attaquer la nuit, parce que les bandits profitent du noir pour attaquer les gens. Donc nous sommes vraiment inquiets, même s’ils veulent qu’on paye la facture, nous le payerons pourvu qu’on nous donne le courant, nous souffrons énormément », déplore-t-il.

« Le gouvernement aurait dû nous laisser payer nos factures… »

Selon un responsable de l’agence préfectorale de l’EDG, cette situation ne concerne pas seulement Kindia, toutes les zones interconnectées sont dans la même situation, une information qui ne rassure pas les citoyens, pour eux l’origine du délestage qui se multiplient du jour en jour n’est pas évoquée.

A Pita, alors que le besoin en courant électrique augmente auprès des populations, surtout avec les cours à distance initiés par le ministère en charge de l’Education, le courant électrique se fait de plus en plus rare dans la cité abritant le barrage de Kinkon. Une situation qui inquiète à plus d’un titre les populations de Pita, composées de menuisiers, de vitriers et de soudeurs qui peinent à faire tourner leurs boîtes sans électricité.

En dépit de tous ces besoins, force est de constater que depuis mi-mars dernier, des coupures incessantes de courant électrique sévissent dans cette préfecture du Foutah. Alhassane Bah, citoyen de Pita dit à propos de la gratuité du courant : « le gouvernement aurait dû nous laisser payer nos factures. Tout en  continuant à nous servir le courant. »

Edg justifie les délestages sans convaincre

Face aux coupures intempestives de courant à Conakry, le responsable de la Communication de l’Electricité de Guinée (EDG), rencontré par notre rédaction, a décliné les vraies raisons de ces délestages.

Selon Camara Naby, il y a l’arrêt   de certaines centrales au niveau de Conakry notamment GDE, la révision d’une partie de la flotte des groupes électrogènes à Kaloum 1 et le pré-remplissage de Souapiti, qui réduirait, lui aussi drastiquement le niveau de l’eau à Kaleta. Ainsi le déficit enregistré par l’EDG est de 62 mégawatts.  Ce qui réduit résolument la capacité de l’entreprise à fournir régulièrement du courant aux populations. Avec pour conséquences, de nombreuses coupures intempestives entraînant parfois des manifestations populaires.  Sans se soucier des raisons invoquées plus haut par le responsable de l’EDG, les citoyens font directement un lien avec la gratuité du courant pour tous ceux qui sont abonnés au tarif social. Mesure prise dans le cadre de l’allègement du fardeau des ménages en cette période de Covid19.

Le ministre de l’Énergie enfonce le clou

Dans une sortie à la télévision nationale, le ministre de l’Énergie a justifié les coupures intempestives au non-paiement des factures: « Si les factures d’achat ne sont pas payées, ces prestataires-là arrivent à arrêter, malgré nos efforts de conciliation que nous déployons pour ne pas arrêter ces centrales. Car cela peut provoquer un manque à gagner dans la desserte. Donc à ce jour, il y a des centrales qui sont arrêtées et qui ne fonctionnent pas, parce que tout simplement, les factures de fourniture d’énergie ne sont pas payées »,

En conclusion, des efforts supplémentaires sont attendus de la part de la population pour au moins stabiliser la fourniture d’électricité en Guinée, le “château d’eau de l’Afrique avec un potentiel hydroélectrique de dizaines de milliers de mégawatts”. Tâche herculéenne dans le contexte de crise sanitaire et économique mondial.

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