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Fondateur d’une académie informelle et coach : Kandet Soumah, un handicapé qui croit en son destin

Handicapé de son état, né en 1988 à Kouyéyah dans la Préfecture de Coyah, il s’appelle Kandet Soumah, fils de feu Abou et de Yarie Soumah. Des études primaires qu’il a effectuées à Kaporo Ecole et celles secondaires au collège de Kipé jusqu’en 10ème année, il est issu d’une famille de neuf (9) enfants, dont sept (7) vivants.

Ce handicapé qui croit en ses possibilités et qui refuse de s’exposer à la mendicité, s’applique et se remet en valeur.

Il a perdu l’usage de ses membres inférieurs en 7ème année.Footballeur, il le fut dit-il et pour la continuité dans la passion, il se trainait pour jouer au football en trottant. D’une touche de balle à un coup franc, bien qu’évoluant sur ce qui est appelé petit champ (terrain réduit aux petits poteaux), il s’engageait pour se mouvoir afin d’exécuter toutes sortes de pénalités en faveur de son équipe.

Difficile d’y croire à l’entendre, votre site électronique Guineenews émerveillé, a rencontré fortuitement Kandet Soumah, fondateur d’une académie informelle et coach de cette équipe minime qui évoluait sur le terrain de Kaporo.

Invalide, deux béquilles sous les aisselles, le long d’un inexistant tracé du terrain sur sa longueur, ce handicapé aussi optimiste a séduit par ses exhortations techniques et tactiques en faveur de cette équipe minime qu’il dirigeait. Un lourd score final infligé à l’équipe adverse après la deuxième mi-temps a émerveillé, suite à sa lecture du jeu. Une réinsertion sociale qui ne dit pas son nom et qui mérite d’être relaté.

Lisez l’interview !

Guineenews : M. Soumah comment êtes-vous venu à ce métier ?

Kandet Soumah : J’ai aimé très tôt le football et j’avoue que je misais sur une plus belle carrière. J’ai été toujours le meilleur parmi mes amis de classe. N’eut été ce handicap qui m’a rattrapé, franchement j’avais des qualités appréciées par tout le monde. Et malgré cette invalidité, je jouais au football à même le sol avec mes bras. Après avoir arrêté mes études, je me suis fixé l’objectif de continuer ma passion. C’est ainsi qu’en 2002, j’ai pris l’initiative de recruter les enfants du quartier pour servir d’entraineur. J’ai sélectionné les enfants de 7 à 12 ans pour un premier temps. Ceux-ci ont évolué avec moi pendant plusieurs années avant de se disperser et se chercher autres chemins.

Présentement je dirige trois équipes d’âges différents qui évoluent sur plusieurs terrains de la capitale et surtout au niveau de mon quartier Kaporo. Je me plais dans ce métieret je continue à faire plaisir aux jeunes et à nombreux admirateurs.

Guinéenews : Pour la plupart des handicapés, la cité de solidarité a servi avant d’abri. Récemment, ce fut l’artère non loin de la cité des chemins de fer. Peut-on savoir qu’est-ce qui vous a éloigné de la pratique de cette fonction de mendicité ?

Kandet Soumah : Certes que je suis issu d’une famille moins aisée. J’ai perdu très tôt mon père. Vu le nombre d’enfants qu’il a laissés (7 vivants), je me suis fixé l’objectif de relever le défi malgré mon handicap. Je ne pouvais pas aller mendier car, je suis un fils digne de Kaporo. Mon quartier natal se trouvant dans la commune abritant cette cité des mendiants, par pudeur et dignité à l’appui, j’ai voulu sauver  l’honneur en me rendant utile à la société. Ma mère, mes frères et sœurs vivent et il est déshonorant de voir son parent dans de telles pratiques. Je me battrais jusqu’au bout.

Guinéenews : Comment vous parvenez à soutenir toutes ces équipes de votre académie qui est informelle et qui ne profite d’aucune subvention à titre structurel ? Et comment s’appelle votre académie ?

Kandet Soumah :Ce n’est pas facile pour moi de joindre les deux bouts dans cette initiative. Pratiquement, nous évoluons sur la base des cotisations. Les jeunes cotisent à la hauteur de 15.000 fg pour l’achat des maillots qui coutent 30.000 fg. Le complément est généralement cotisé par les parents soucieux et voulant voir un jour leurs enfants réussir dans le football. Vous avez constatez que les jeunes ne portent même pas de chaussures appropriées pour la pratique. Chacun vient avec la paire de sport dont il dispose. Je crois aux talents de ces jeunes et je suis convaincu qu’ils réussiront un jour par la grâce de Dieu.

Pour témoigner mon engagement afin de réussir dans ma mission, mon académie a pris le nom ‘’Académie mandingue’’ à cause de Soundiata Kéita, reconnu pour sa bravoure malgré son invalidité.

Guinéenews : Peut-on savoir si tous ces jeunes recrutés par vous fréquentent l’école ?

Kandet Soumah : Rassurez-vous qu’aucun jeune n’intègre ma structure si tu n’es pas à l’école. C’est une décision commune et un pacte signé entre moi, les parents ainsi que les autorités de Kaporo en charge des sports. C’est Dieu qui m’a éloigné de la mendicité qui est récurrente dans ce pays. J’ai voulu étudier et le destin m’a dirigé vers cette autre passion qu’est le football. Actuellement pour réussir dans le football, il est important d’avoir un niveau d’études appréciable. Le football est devenu une science. Ainsi, à tout prix, j’oblige les enfants à fréquenter l’école.

Guineenews : Près de 18 ans d’expériences pratiques, relatez-nous un beau et mauvais souvenir que vous gardez ?

Kandet Soumah : Mon plus beau souvenir est la participation d’une de mes équipes lors d’un tournoi organisé au stade de l’Université Général Lansana Conté. Lors de ce tournoi, mes jeunes ont pu accéder à la finale et ont été battu sur le score de 1 but à zéro. Le marquant souvenir est la phase de la demi-finale où j’ai voulu renoncer à cause de l’âge des adversaires du jour. N’eut-été la volonté et l’engagement de mes jeunes, j’avais voulu renoncer et signer le forfait. Heureusement, j’ai écouté l’ensemble et nous sommes allés en finale face à d’autres gaillards.

Mes plus mauvais souvenirs continuent toujours à m’irriter. Imaginez que je continue toujours à former des jeunes qui décident de me quitter pour fautes de moyens, en un mot par manque de soutien. Cela fait mal au cœur et surtout quand je pense à mon état physique qui m’empêche d’être au réel bout de ma passion. J’ai parfois envie d’abandonner au vu de ces états de fait. Heureusement, je crois en Dieu et qu’il nous donne longue vie et puisse nous assister afin de réaliser nos rêves.

Guineenews : Sans moyens pour atteindre vos objectifs avec ce handicap qui vous a rattrapé à bas âge,aviez-vous un appel à lancer aux bonnes volontés ?

Kandet Soumah : Je demande tout simplement de l’aide afin de soutenir tous ces enfants désireux de pratiquer ce sport roi. C’est une manière de contribuer à l’éducation des enfants pour leur épanouissement. Mon académie manque énormément de moyens. J’ai un autre souci c’est celui d’avoir de l’aide au niveau de l’état pour formaliser ma structure et je ne sais à quel sain me vouer. C’est l’occasion pour moi de remercier ici Mr Ibrahima Diallo ‘’Tonton Ibro’’, tôlier de profession à Kaporo, qui nous a offerts pour la première fois 12 ballons de football. Je lance un appel à tous les bienfaiteurs de venir au secours de mon académie afin d’aider les jeunes, les encourager à se stabiliser dans ma structure pour avoir une formation continue.

Guineenews : Quel est votre regard sur le football guinéen et particulièrement le Syli national ?

Kandet Soumah : Nous savons tous que le jeune guinéen joue bien au football. Il faut souligner quand même cette baisse de niveau par rapport aux autres pays. Quant au Syli national, je regrette du fait qu’on accorde peu d’importance au recrutement des joueurs locaux. Pourtant au sein de nos clubs, il existe de performants joueurs qui peuvent rivaliser plusieurs professionnels qui ne viennent que pour rafler l’argent de l’Etat.Il faut penser aux joueurs locaux en leur donnant la chance d’évoluer sur le plan international. Ces joueurs recrutés au sein du Syli national doivent redoubler d’effort pour satisfaire ce public guinéen qui aime le football et qui est habitué aux victoires.

Entretien réalisé par LY Abdoul pour Guineenews.

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