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Guinée – Insémination artificielle : l’initiative présidentielle bat de l’aile au Fouta Djallon

Lancée en grande pompe par le chef de l’État en personne en prélude aux journées nationales de l’élevage les 23 et 24 juillet 2018 dans la région administrative de Labé, l’insémination artificielle peine toujours a donné les résultats escomptés. Deux ans après cette opération de grande envergure qui devrait renforcer les cheptels, la ville de Labé fait face actuellement à une crise de viande sans précédent, a constaté sur le terrain la rédaction régionale de Guinéenews basée sur place.

Pourtant dans son allocution tenu à l’occasion au stade régional El Hadj Saifounlaye Diallo de Labé devant des milliers de personnes, le professeur Alpha Condé avait annoncé la fin du calvaire lié au manque de viande et de lait au Foutah Djallon, en particulier et sur toute l’étendue du territoire national en général. L’insémination artificielle, serait pour lui la solution pour rehausser le poids des bêtes et renforcer les cheptels.

« Nous allons révolutionner l’élevage au Fouta. Nos bœufs sont maigres, ils ne pèsent pas plus de 200 kilogrammes. Alors que nous voulons que nos bœufs pèsent 500, 600, 700 kilogrammes. Nos vaches donnent 2,3 à 4 litres de lait, nous voulons qu’elles donnent 11, 12 litres. C’est pourquoi nous avons convoqué la journée de l’élevage. Nous devons remercier le Roi Mohamed 6, le peuple et le gouvernement marocain, parce que ce sont eux qui nous ont accompagné en nous donnant les moyens pour faire l’insémination», a, alors laissé entendre le professeur Alpha Condé du haut de la tribune du stade régional El Hadj Saifounlaye Diallo de Labé.

Ainsi dit, ainsi fait. Le même jour, le président de la République, accompagné d’une horde de ministres, s’est dirigé à l’amphithéâtre ENI CFP (école normale des instituteurs centre de formation professionnelle) de Labé pour procéder officiellement au lancement de l’opération tant attendue. Du 24 juillet 2018, il a fallu patienter jusqu’au mois de février 2019 pour la matérialisation de l’insémination proprement dite.

En lieu et place des 25 vaches prévues pour la région de Labé, ce sont seulement 14 qui ont été retenues, selon docteur Mamadou Malal Baldé, le directeur régional de l’élevage de Labé, qui au lendemain de l’opération a fait état de 14 vaches inséminées dans son giron. « Au niveau de Labé, je précise que 25 vaches devaient être inséminées. Malheureusement, vu le système d’élevage, les femelles qui ont été identifiées au départ la semaine dernière. Il s’est trouvé que beaucoup d’entre elles étaient déjà gestantes. Mais, comme on devait poursuivre le processus déjà identifié et qui a été analysé négatif au laboratoire, il ne restait que 14. C’est avec ces 14 que nous sommes en train d’évoluer », a déclaré le directeur de l’élevage, quelques jours après l’insémination des bêtes.

A l’époque, les attentes étaient grandes et les résultats devraient être visibles dans une période de 9 mois : « nos attentes sont très fortes. Nous pensons qu’ils vont bien entretenir les animaux inséminés parce qu’une fois l’insémination réalisée, 9 mois après, ils doivent s’attendre à des vaux. A leur naissance, il faut une assistance. Donc, je suis très confiant que ça se passera bien », avait souhaité le directeur régional de l’élevage de Labé.

Interpellé ce vendredi 08 mai par la rédaction locale de Guinéenews sur la situation de ces bêtes inséminées, Docteur Mamadou Malal Baldé, le directeur régional de l’élevage n’a pas voulu commenter la chose à notre micro. Pour tenter de creuser plus, les reporters de votre quotidien électronique ont réussi à joindre au téléphone le ministre de l’Elevage. Roger Patrick Milimono s’est contenté de nous dire que le rapport sur l’insémination artificielle est en cours de rédaction et qu’il ne peut se prononcer dessus qu’après publication dudit document.

Par contre, de fil en aiguille, on a réussi à mettre main sur le propriétaire des bêtes inséminées au compte de la région de Labé. Basé à Kalan (sous-préfecture situé à environ 20 kilomètres à l’est de Labé) Boubacar Gadjiko a quant à lui accepté de nous situer sur les résultats de l’opération. Sauf que finalement, sur ce total de 14 bêtes inséminées, vraisemblablement c’est seulement 3 vaches qui ont finalement supporté l’opération. Mais pas que, car selon nos investigations, seulement une vache semble avoir donné un résultat plus ou moins satisfaisant, a appris Guinéenews de sources concordantes.

« Parmi les trois vaches, c’est une seule qui semble avoir donné un bon résultat ; ça n’a pas marché chez la seconde et il y a toujours un flou avec la dernière. De nos jours, ça fait plus d’une année depuis l’insémination. Les bêtes ont été inséminées au même moment mais il y a eu un peu plus d’un mois entre la mise bas des deux. Voilà pourquoi le doute plane sur la dernière gestation. Les vaux ont grandi et celui qui semble avoir réussi à juste 4 mois et est bien portant. A sa naissance, il avait 26 kilogrammes contre 25 kilogrammes pour les vaux naturels », soutient Boubacar Gadjiko, l’éleveur qui vit avec les bêtes inséminées à Labé.

A la lumière de ces informations, force est de reconnaître que la Guinée a toujours du chemin à faire par rapport à la concrétisation de ce programme présidentiel orienté sur l’élevage. En attendant, une crise de viande sans précédent est constatée en cette année dans la commune urbaine de Labé où la protéine prisée en ce mois de ramadan se fait de plus en plus rare au niveau des boucheries de la place.

Boubacar Kanté, le chargé des conflits à la boucherie centrale de Labé dit n’avoir jamais vécu une telle crise : « actuellement, il n’y a pas du tout de viande. Pour cause on ne trouve plus de bêtes à abattre et le peu qu’on  trouve ne donne pas le poids normal. Et cela est habituel chaque année en cette période ; mais cette année, c’est pire car c’est par accident qu’on trouve des bœufs. En plus, le prix est trop cher, mais on ferme les yeux ; le grand problème c’est le manque criard. Par exemple hier on n’a pas eu de bêtes à abattre, aucune bête; donc la boucherie n’a pas servi. C’est aujourd’hui qu’on a eu 10 vaches, alors qu’en temps normal, on peut abattre 30 à 40 bêtes par jour», précise-t-il.

Il faut rappeler qu’en plus de Labé (au Foutah Djallon), l’insémination artificielle a été effectuée à la même période à Kouroussa (en haute Guinée), à Guéckédou (en Forêt) et à Forécariah et Boké (en Basse côte). Mais selon nos informations, le résultat serait au meilleur des cas le même qu’à Labé et au pire des cas, catastrophique dans la plupart des régions bénéficiaires, à en croire nos sources qui pour des raisons de service ont préféré garder l’anonymat.

Par ailleurs, force est de reconnaître que le même scenario a été constaté au niveau de l’initiative présidentielle liée à l’importation des chèvres rousses de Maradi au Niger. Sur un total de 14 chèvres reçues dans la préfecture de Labé, à ce jour seulement 2 sont en vie, selon nos informations. Face à ces échecs en répétition, une batterie d’interrogations taraude les esprits. Le problème serait-il au niveau de l’importation de ces nouvelles techniques ou est-ce la gestion et le suivi qui feraient défaut ? L’avenir nous édifiera.

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